Le Tambour : BRAVO !
Parce que les cloches à "l'indienne": on voit pas bien !
Les Canons étaient plutôt du côté de Custer !
VOIX, TROMPETTE ET
TAMBOUREn dehors de la bataille, il suffisait d'une voix bien assurée pour transmettre aisément les ordres du capitaine à tous les échelons de sa compagnie, car la distance d'un officier au plus proche de ses sous-ordres n'excédait jamais dix mètres, quelle que soit la formation adoptée.
Il en allait tout autrement au combat, en raison de l'ambiance considérablement bruyante dans laquelle les soldats se trouvaient plongés. Les déflagrations de la poudre noire, tant des fusils que des canons entretenaient un vacarme épouvantable que nous avons du mal à imaginer.
" Je sentais en permanence la terre trembler sous moi ", écrit un soldat blessé sur le champ de bataille de la Moskowa.
A Boulogne, en 1804, il suffit de quelques canons tirant à blanc en accompagnement d'un " Te Deum " chanté à l'église Saint Nicolas, pour faire voler en éclat toutes les vitres du quartier.
J'ai moi-même pu comparer en 1969, lors du tournage du film télévisé " La Grande Armée ", le tir en salve des " Arquebusiers de France " armés de fusils modèle 1777 avec le tir à volonté d'une compagnie d'infanterie du contingent, et j'ai constaté combien les armes automatiques modernes s'avéraient moins assourdissantes que leurs aînées.
Dans ces conditions, on comprend combien la transmission verbale des ordres, au combat, se trouvait compromise. Il eût fallu utiliser, comme dans la marine, des porte-voix. Mais nous ne connaissons aucun exemple d'une telle utilisation dans les armées de terre ; l'instrument eût été trop encombrant et surtout moins efficace que ses suppléants, à savoir la trompette et le tambour.
En effet, c'est par l'intermédiaire de ces deux instruments de musique qu'au plein feu de l'action les officiers avaient les meilleures chances de passer un ordre et de le voir immédiatement exécuter.
La trompette était le porte-voix de la cavalerie. Dans l'ordre de bataille, le colonel avait toujours à son côté un brigadier-trompette prêt à traduire son commandement par une phrase sonore bien connue de tous. Celle-ci était reprise par huit trompettes groupés, placés sous le commandement d'un adjudant, ensemble suffisamment puissant pour que tout le régiment puisse percevoir la sonnerie. De cette façon, le colonel pouvait commander " la charge, la retraite, le ralliement, aux champs, à cheval, en marche "... Plus exactement, les trompettes ne se substituaient pas à l'ordre verbal, mais le précédaient ou le suivaient immédiatement, la phase sonore amplifiant en langage musical ce qui était énoncé en langage verbal.
Dans les troupes à pied, le même rôle échouait aux tambours. Comme les trompettes, ces derniers présidaient aux fonctions journalières de la vie militaire : " le réveil, la diane, les rigodons du matin, pour les drapeaux, les honneurs à l'Empereur, l'extinction des feux "... Au combat ils évoluaient groupés sur deux rangs, à quinze pas en arrière du premier bataillon de chaque régiment. Ce qui ne les empêchait pas d'être parfois fauchés par la mitraille, avec tout ce que cela pouvait avoir comme répercussion dans la transmission des ordres. Ainsi, lorsqu'à la bataille de Dresde les tambours du 3ème tirailleurs de la Jeune-Garde sont frappés par une volée de biscaïens, on voit les hommes suspendre un moment leur attaque, chacun se demandant : " Qui vient donc de commander : halte ? "
A propos des tambours, rappelons que cet instrument était parfois utilisé comme récepteur accoustique : la caisse était posée à terre, la membrane supérieure amplifiait un bruit lointain de mousqueterie ou de déplacement de cavalerie transmis par le sol d'une façon imperceptible ; il suffisait donc d'y coller son oreille pour déceler la proximité ou les mouvements de l'ennemi.Il ressort de ce que nous venons de dire que non seulement chaque régiment d'infanterie ou de cavalerie possédait, outre sa fanfare, ses tambours ou ses trompettes, mais qu'il en était de même pour toutes les compagnies des autres armes, que ce soit artillerie, génie etc..., ce qui prouve bien qu'à ces musiciens était dévolu un tout autre rôle que de battre ou de sonner la charge. Selon le même principe, tout état-major d'un officier-général comprenait, en plus des aides de camp, la présence permanente d'un trompette : le téléphone du général !
Ainsi donc, tambours et trompettes constituaient-ils, au sein de chaque unité combattante, une arme à part : ils étaient " les soldats des transmissions " avant la lettre.
Leur rôle au combat demandait beaucoup de sang froid, car les tambours, uniquement armés d'un sabre-briquet, ne pouvaient guère qu'encaisser les coups sans pouvoir les rendre ; quant aux trompettes, lorsqu'ils se trouvaient confrontés avec l'ennemi, ils agissaient de la sorte: ils rassemblaient prestement trompette et rênes dans la main gauche pour libérer la main droite et tirer le sabre; en cas de surprise ils assommaient l'adversaire en frappant à la tête avec l'instrument brandi de la main droite.
Ces " hommes des transmissions " jouissaient donc à juste titre d'une considération au moins égale à celle des autres soldats ; beaucoup bénéficiaient d'une nourriture et d'un logement de sous-officier et touchaient une solde double de celle d'un simple cavalier ou fantassin. Avant l'institution de " la croix ", ils avaient eu droit aux honneurs particuliers des trompettes ou baguettes d'honneur décernées par le Premier Consul. Aussi serait ce autant une erreur qu'un affront de les confondre avec la fanfare du régiment, composée soit de musiciens gagistes ayant contacté un engagement militaire, soit de civils sans solde entièrement à la charge des officiers, donc soldats d'occasion, tels ceux de l'infanterie a Essling, s'enfuyant aux premiers coups de canon pour aller se réfugier dans l'île de Lobau !