Bonjour
Tout anecdotique qu'ai pu être la prise de ces pièces et leur retournement contre l'adversaire il correspond bien cependant a la "tradition" des fantassins-canoniers hérité des guerres de la Révolution.
1°) Sur un plan théorique voici l'information la plus importante à mon sens :
Oula sous l'empire et en particulier au début de la periode le théorique repose sur quelques instructions destinées au commandants de corps et sur la lecture d'un ouvrage: l'essai général de tactique.
L'ensemble de l'instruction n'est pas théorique mais pratique. D'autant plus pratique que sur l'ensemble des hommes sur les rang nombre de soldats comptent déjà une campagne et ont acquis l'art de la guerre sur le terrain. On parle du 13eme léger ? contenant un ennemi supérieur en nombre le régiment a un moment de la bataille a vu son flanc contourné par une charge de cavalerie. L'ensemble du régiment a quitté sa position en petite foulée pour traverser Hassenhausen et se reformer en carré derrière le village. Lorsque la cavalerie de Blucher va tomber sur le régiment le carré ne comporte que trois côtés...Et se reforme en fonction de l'arrivée des fuyards. Le colonel ordonne le feu sur la cavalerie a 150 pas et personne ne tire sur les rangs. Un deuxieme ordre est donné et personne ne tire . Le régiment ouvrira le feu a 30 pas selon les dires des temoins et la charge des cavaliers prussiens sera brisée nette par la décharge. Le colonel dit on avait mangé son chapeau.
L'armée de 1805, 1806 comporte des milliers d'exemple d'initiatives des bas échelons en dehors de toute manoeuvre théorique de manuels dont je doute qu'enormément d'hommes aient fait la lecture. D'ailleurs la théorie explique uniquement les evolutions complexes des compagnies, bataillons régiments sur le champs de bataille et l'instruction theorique réside surtout dans la réalisation de ces mouvement sur le champs de bataille. ( ce sont généralement des instructions datant de l'epoque de Carnot qui réorganisa les armées de la République).
L'essentiel des techniques de combat se transmet par oral des instructeurs aux soldats et vice versa. D'autre part dans cette armée la hiérarchie n'est pas aussi forte que dans nos armées. Si vous possédez les memoires du capitaine Coignet tout sujettes a caution qu'elle soient regardez comment Coignet enseigne l'utilisation du fusil dans les mêlées au corps à corps et comment en deux coups de baionnette on se débarasse de 3 adversaires et on traverse une ligne d'infanterie... Il n'y a pas si longtemps les plus "vieux" cadres n"etaient que soldats. Leur autorité repose sur leur compétence au combat tant technique que tactique. Songez a la prise de Leipzig par la poignée de cavaliers de Lasalle. Ce n'est qu'un exemple symptomatique du fonctionnement de la grande armée a cette époque.
Maintenant il est certain qu'il sera très difficile de simuler ces techniques particulière de combat. Par exemple en lisant avant poste de cavalerie légère ( d'ailleurs bcp d'instructions théoriques seront rédigées après les guerres napoleoniennes par des cadres réduits a ne faire que de l'instruction) du Général Brack , on apprend que dans la cavalerie légère il est une technique qui permet a coup sur de mettre hors de combat un ennemi cavalier plus lourd de type dragons ou cuirassiers. On lance une attaque de cavalerie régulière au pas en ligne botte à botte...L'adversaire sur de lui lance sa charge et l'avance au pas des français peut laisser penser que ces derniers manquent de contenance. On augmente le rythme en montant au trop, l"ennemi se conforte dans son attitude de charge en ligne et au moment opportun qui ne peut guère être connu que par des cavaliers ayant eu l'habitude de ce genre de technique, la cavalerie légère réalisait un a droite droite pour se retrouver en colonne qui chargeait dès lors a bride abbatue sur un flanc de la ligne ennemie mettant dans le vent la majorité des cavaliers ennemi et créant localement une supériorité numérique favorables aux français, semant le désordre et anihilant tout l'avantage de la charge en règle a cheval. Ensuite la supériorité individuelle des cavaliers français au duel monté n'est pas a prouver. Qu'on pense a l'action de Guindet de même contre le prince Louis Ferdinand de Prusse. Le cavalier charge on adversaire pointe en avant, abandonne la posture et esquive le coup de sabre adverse réarmant le bras pour frapper dans les reins de l'adversaire dépassé. En ce qui concerne cette tactique de cavalerie légère elle est le résultat d'expérience acquises au contact de diverses cavaleries et ressemble etrangement aux façons des mamelouks et turcs de faire la guerre...
Ce que recherchait Napoléon, c'était d'appuyer par ses feux d'infanterie sa cavalerie lancée à grande distance et non pas que la cavalerie soit au service de l'infanterie
S'il s'agit d'appuyer qu'on soit bien clair ce n'est pas dans le combat régulier qu'il faut penser cet appuis. On voit mal une compagnie de partisans montés mener un combat régulier en ligne a proximité d'une unité de cavalerie en charge pour appliquer des tirs sur un ennemi attaqué. Je ne crois pas que ce soit l'appuis par le feux dont il s'agisse.
La volonté de l'empereur est de pousser les cavaliers à mettre pied a terrre pour mener des operations de petite guerre avec ce type d'unité. Le mousqueton permet au cavalier de disposer d'une arme peu encombrante qu'on peut transporter a cheval. En fait ce que voulait l'empereur ce sont des commandos montés aptes aux coups de mains sur les arrières ennemi afin d'acquérir le renseignement et de semer le désordre sur les arrière de l'ennemi.
De même si on y réfléchi en 1806 ont été créé 2 regiment de 2 bataillons de dragons ... à pied.Leur organisation etait celle de l'infanterie. La capture de chevaux en prusse les activera en rgt de cavalerie durant cette campagne.
Pour shematiser c'est un peu la manière cow boy de considérer la cavalerie. On se déplace a cheval et on combat a pied en tirailleur ou plutot en désordre ( comme actuellement en fait).
Par ailleurs, si d'aventure Napoléon avait envisagé cet usage particulier des voltigeurs au camp de Boulogne et les avait entraîné en conséquence, cela n'aurait pu être que pour les voltigeurs de l'infanterie légère puisque ceux d'infanterie de ligne n'ont été créés qu'après la levée du camp fin 1805 (cf. ci dessus).
Et le hic, c'est que dans le corps de Davout à Auerstadt, il n'y a qu'un seul et unique régiment d'infanterie légère : le 13eme
.
Si vous me permettez vous faites une petite erreur. Effectivement l'organisation des compagnies de voltigeurs date de fin 1805 mais Auerstadt c'est fin 1806. Depuis un an ces compagnies existent dans les régiments d'infanterie de ligne. Les bataillons sont a 9 compagnies 1 de grenadiers, une de voltigeurs et 7 de fusiliers de ligne. Dans le corps de Davout l'ensemble de l'infanterie connait les manoeuvre de l'infanterie légère ( comme expliqué dans le livre de D. Reichel).
Au camp de Boulognes chaque jour l'infanterie s'exerçait au tir et tirait 15 cartouche ce qui correspondait à la quantité de munitions tirées dans une bataille.
Lorsque l'ordre sera donné de créer les compagnie légères le combat de voltigeur est connu et le décret ne vient que valider et organiser un système acquis et developpé depuis les guerres d'indépendance américaine et theorisé par Guibert dans son essai général de tactique. Mais dans ces temps de guerre la théorie et l"administration n'ont guère d'impact sur l'action et l'expérience des troupes.
Bref, on le voit, cela devient vraiment difficile pour nos amis voltigeurs de ne serait-ce qu'approcher de près la queue d'un cheval.
Donc il s'agit bien de voltigeurs de la ligne que ceux ci soient ceux décrétés par l'administration
ou ceux mis en oeuvre par les chefs de bataillons evoluant dans le brouillard . Cependant concernant cette anecdote je recherche actuellement mes sources puisqu'il y a quelques temps que j'ai laché le pied et je remets actuellement en ordre ma bibliothèque
Certes des unités interarmes pouvaient se soutenir mais de là à ce que des cavaliers se transforment en transporte-biffins, il faudrait un ordre express d'un supérieur hiérarchique, seul capable d'obliger les chefs de cavalerie (i.e. Viallanes à Auerstadt) à le faire, ce qui suppose encore que ledit supérieur ait "préparé son coup", or, à Auerstadt, nous sommes dans une bataille de rencontre. Ni Davout ni Friant (alors en position à droite et qui demande à Viallanes d'aller nettoyer le bois du Spielberg) n'ont à perdre du temps pour s'occuper en détail de quelques compagnies de voltigeurs...
Non je suis désolé mais pour un chef de guerre c'est la situation qui commande et les vrais chefs le savent. Lorsqu'on est sur le terrain c'est l'imagination, l'exploitation de la moindre opportunité qui compte et le moral des français de cette armée de 1805 et 1806 est tout a fait révélateur de ce type des coups tordus. Il ne s'agit pas d'exploiter un ordre mais bien de faire preuve d'initiative et l'initiative part non d'un général qui ne voit rien de la situation mais du type qui est sur le terrain et au contact et qui seul peut générer ce type d'action d'ailleurs. On voit mal d'ailleurs systématiser le procédé pour l'époque. Cependant la grande force de l'armée française d'alors c'est d'une part la grande compétence technique et tactique des troupes aux plus bas echelons et ensuite le moral exeptionnel de l'armée. On considère qu'une armée se débande et abandonne le combat à 30% de pertes. Dans l'armée de 1805, 1806 même a 50% de pertes les troupes continuent a combattre et à remporter les batailles.
4°) Je terminerai sur l'utilisation des pièces adverses par des soldats d'infanterie :
Pour l'utilisation de pièces adverses, effectivement, des soldats de Boulogne (officiellement les Grenadiers et Carabiniers de la Ligne, et les Grenadiers et Chasseurs de la Garde) avaient été formés au service des pièces, et il s'est trouvé quelques circonstances qui s'y sont prêtées. Mais là encore, ni de manière massive, ni de façon systématique. Cela relève plus de l'initiative locale des combattants que d'ordres supérieurs.
Pour Auerstaedt, on retrouve trace de cela dans une citation qui m'a été communiquée par la personne citée au début de ce post : "Le caporal Boutloup et une poignée de voltigeurs du 21e s'emparent d'un canon, assomment, dispersent les servants, tournent la pièce contre l'ennemi et lui envoient ses boulets."
Ce texte est tiré du "Iéna" de Lachouque (page 247). Si cet événement est mentionné, c'est peut-être justement parce-qu'il est le seul, que c'est exceptionnel... et pas courant. A Auerstadt, il est indéniable que de nombreuses batteries furent effectivement prises mais pas pour autant "retournées" contre l'ennemi.
Il est fort possible que le caporal Boutloup (on aurait du le surnommer "Boutfeu" ) ait pris une pièce chargée et prête à l'emploi si j'ose dire.
Je veux juste rappeler que l'emploi de l'artillerie dans l'armée prussienne pour l'infanterie est courante depuis Frédéric II et la guerre de 7 ans. Frédéric II avait developpé de petites pièces d'artillerie qui étaient attelé a des fantassins ou des mulets selon les moyens disponibles et dont la mission etait d'appuyer a longue et courte distance l'infanterie. Le fait d'entendre le canon et de subir des tirs a plus de 500m est un moyen de gagner un ascendant moral sur le champs de bataille.
A Auerstadt les bataillons prussiens utilisent ces pièces de 6 livres hérités des canons de "fer" de l'armée suédoise de Charles XII. Ces canons a la suedoises sont ceux qui ont été pris et employés par les soldats français parce que les soldats français savaient manoeuvrer ces pièces et parce que le leur emploi etait extremement simple et souple.
Ces pièces capturées seront réutilisées par l'armée impériale et adoptés par l'infanterie. En 1809 je crois que c'est 3 pièces qui sont attribuées par bataillon pour renforcer la puissance de feu des jeunes conscrits.
Deux hommes sur un cheval ralenti par leurs poids respectifs forment une bien meilleure cible, qui ne peut guère s'abriter, qu'un simple voltigeur "à pied". Nous sommes sur un champ de bataille où les forces sont en présence. Pour un voltigeur, il n'est donc pas question d'aller vite (par exemple en montant sur la croupe d'un cheval) mais d'aller bien (par exemple en s'approchant le plus près possible de l'ennemi sans attirer son attention).
Le combat irrégulier permet à contrario ce mode d'action et je ne suis pas convaincu par votre avis sur les cibles. Vous avez une vision de la guerre napoleonienne trop calquée sur les tableaux de Lejeune et des rapport rédigés après coup d'officiers d'Etat major de l'empereur, qu'ils s'agissent de Ségur, ou d'historien a postériori.
Je parle d'expérience et de comparaison. Effectivement le fait de se balader en croupe est anecdotique et vous ne transporterez jamais l'infanterie de votre armée de cette manière ( même si dans l'armée grecque d'Alexandre cette technique fut courement employée) mais au niveau tactique et dans des circonstances particulières cela permet de créer la surprise. La progression est rendue rapide parce qu'assurée effectivement par l'exploitation des couvert et des angles mort pour approcher au plus près l'ennemi. A porté de tir ces hommes se sont mis a pied et ont ouvert le feu sur ces artilleurs décontenancés .
Comprenons nous bien mon but n'est pas d'inventer des histoires mais de repondre à la question posée. Ce que je vous avance sont des faits avérés et relatés dans les compte rendus des officiers ayant participé aux combat en 1805 et 1806.
Objectivement, ma conviction est que des pièces ont été prises par les voltigeurs à Auerstadt mais de là à imaginer que pour ce faire ils aient été transportés à dos de cheval et amenés devant les batteries en position...
Effectivement la chose ne fut pas systématisée mais c'est bel et bien les compte rendus de prise d'au moins une batterie par ce type de mouvement.
Ce système n'est pas nouveau et a été employé sur de nombreux champs de bataille comme relaté par Coignet, mais aussi par Ségur.
Même au cours de la premiere guerre mondiale je me souviens d'avoir vu des tableau relatant l'attaque de fantassins ecossais dans le Nord et des australiens en Palestine menant la charge accrochés aux etriers et aux pommeaux des selles de deux cavaliers avançant vers les positions allemandes ou turques. Une autre technique consistait ayant le fusil en bandouliere de se faire porter en avant accrochés a la queue des chevaux !