Auteur Sujet: Marechal Grouchy  (Lu 3874 fois)

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Marechal Grouchy
« le: 05 octobre 2009, 13:29:26 pm »

«On est tenté de lui répéter, ce qu'Edgar Faure disait à Christian Fouchet en septembre 1968: «Il est plus tard que tu ne crois! «Nouveau Grouchy arrivant à la bataille après la consommation des désastres».
Article paru dans Le figaro le 31 mai 2001 sou le titre «Le syndrome de Grouchy».

Il est inscrit dans la culture populaire que Grouchy est celui qui n'est pas arrivé à temps à l'endroit où on l'attendait précipitant ainsi la chute du plus illustre des français : Napoléon Bonaparte. «Vox populi :la voix des pantins» disait William.T.Sherman.

En effet, il est rare de voir l'honneur d'un homme autant souillé que celui d'Emmanuel de Grouchy (Paris, 1766 - Saint-Etienne, 1847), qui en 1815 comptait 35 années de service d'une carrière militaire exemplaire et à laquelle beaucoup feraient mieux d'attacher, sinon de l'admiration, du moins beaucoup plus de respect. Son discrédit a été orchestré pour expliquer la défaite de Waterloo, si bien que dans l'esprit de nombreuses personnes il n'est pas compté parmi les maréchaux d'empire.

Grouchy était-il un général de valeur capable de commander de façon autonome un corps ou une armée ? Méritait-il la distinction de maréchal d'empire ? Son comportement lors de la campagne de Belgique en 1815 justifie-t-il tous les accablements, les quolibets, les outrages dont il a été victime par la suite ?



Le général Grouchy


Avant d'accéder à la distinction de maréchal d'empire, Grouchy avait-il démontré dans son parcours qu'il disposait de la capacité de commander en chef ? Plus généralement, quelles sont les qualités qui font d'un homme le meneur légitime d'un corps ou d'une armée ?
Un général en chef doit réunir plusieurs compétences distinctes.
En premier lieu, il doit être courageux. Le courage est la première qualité d'un chef militaire voulant être respecté et obéi de ses hommes.
En second lieu, il doit se montrer habile à l'échelle tactique. La compétence tactique, c'est l'art de combiner tous les moyens militaires et naturels au combat. La combinaison de ces deux premières qualités (habileté tactique et courage) va souvent de pair avec le sens de l'à-propos, qui est défini par F. de Brack comme «L'expression du génie de la guerre…L'officier qui commande à-propos, c'est le timonier qui, dans la tempête, donne le coup de barre à un pas de l'écueil, et sauve le navire.. Une nature forte qui ne s'étonne de rien et calcule d'autant plus froidement que la partie qu'il joue semble plus compromise»(1) .
Lorsqu'il réunit ces premières caractéristiques, un homme pourra mener avec succès des troupes à chaque contact avec l'ennemi. Ce sont là les vertus d'un bon général de brigade.

Mais pour pouvoir prétendre à être indépendant et diriger, sur une plus grande échelle, la manœuvre de forces plus importantes de façon à créer un avantage tactique, un général doit disposer, en outre, d'une compétence stratégique. C'est à dire la faculté à faire évoluer une armée sur un théâtre d'opération jusqu'au moment où elle entre en contact avec l'ennemi. Cette faculté supplémentaire transforme le commandant de brigade en un chef de division ou de corps d'armée au talent unanimement reconnu.

Enfin, comme il est relativement rare de s'improviser général en chef (tout le monde n'a pas le génie d'un Bonaparte), l'expérience du commandement permet souvent de désigner quels sont les candidats les plus aptes à assurer la fonction de généralissime.

Un officier général de talent combinera l'ensemble de ces qualités, et plus la maîtrise de celles-ci s'exprimera sur le terrain, plus la valeur de ce général sera démontrée.
Grouchy avait il les compétences pour prétendre à exercer le commandement de l'aile droite lors de la campagne de 1815 ? Certainement. Ses état de services avant et pendant cette campagne l'attestent.

(1) De Brack, Avant-Postes de Cavalerie légère, p.162



Le courage


Tous les généraux et à fortiori les maréchaux ayant fait les campagnes de l'empire étaient courageux jusqu'à la témérité. Mais ce qui frappe le plus chez ces hommes c'est leur capacité sous le feu, dans des situations désespérées, à avoir non seulement du courage, mais à pouvoir le communiquer à leurs subordonnés pour emporter la décision sur le champ de bataille. Dans ces moments leur répartie ne peut que laisser béat d'admiration. L'épopée du consulat et de l'empire regorge d'anecdotes comme celle contée ci-dessous.

Le 18 juin 1815 près de Wavre, le 4eme corps de l'armée du Nord aux ordres du brillant général Gérard attaque le moulin et le pont de Bierges tenu par neufs bataillons Prussiens. Le terrain est favorable à la défense. La division Lefol lance une première attaque. Elle est vigoureusement repoussée. Grouchy ordonne alors de soutenir la division Lefol par un bataillon de celle d'Hulot. Nouvel échec. Gérard conduit alors personnellement une nouvelle offensive ; il est grièvement blessé d'un coup de feu dans la poitrine.
Grouchy confie sur le champ le commandement du 4eme Corps au général Baltus qui le refuse. Le marquis se montre alors impérial, mettant pied à terre il se place à la tête d'une colonne et déclarant «quand on ne peut se faire obéir, on se fait tuer»(2) , il prend la tête d'une nouvelle attaque.

Même si cet ultime assaut sur le moulin de Bierges ne sera pas couronné de succès, quel panache digne d'un Murat ou d'un Ney !



 


Compétence tactique et à-propos


Si le courage est l'aptitude de base à tout officier voulant avoir valeur d'exemple, l'habileté tactique est prépondérante pour emporter la victoire lors d'un contact avec l'ennemi. La bataille de Friedland, donnée par l'Empereur contre les Russes du général Benningsen le 14 juin 1807 a permis de mettre en lumière les grandes capacités de Grouchy en la matière

Rappelons que pour la bataille de Friedland, en l'absence de Murat envoyé à Koenigsberg, Grouchy (qui dirige initialement la 2e division de dragon) est investi du commandement de toute la cavalerie qui est restée avec l'Empereur. Soit, outre sa propre unité comptant 4 régiments, la division de grosse cavalerie du général de Nansouty (4 régiments de cuirassiers et 2 de carabiniers), les divisions de dragons Latour-Maubourg (6 régiments) et Lahoussaye (4 régiments), et une brigade de cavalerie légère composée du 9e hussard ainsi que de cuirassiers et chevaux léger Saxons.

Le récit est tiré de l'ouvrage du général Bony «Cavalerie au combat, tactique de la cavalerie française».

«Le général Grouchy avait placé sa cavalerie à la droite des grenadiers du général Oudinot. En débouchant dans la plaine de Friedland, le duc de Montebello [le maréchal Lannes] se trouve en présence de l'armée Russe [il dispose alors de 26000 hommes contre 75000 tsaristes ]. Il est appuyé par la brigade légère de cavalerie , une brigade saxonne, les dragons de Grouchy et les cuirassiers de Nansouty.

Les Russes cherchant à s'emparer d'Heinrischsdorf, notre cavalerie va entrer en action. Grouchy la forme sur deux lignes, la première composée de la cavalerie légère et de la brigade saxonne. Les dragons sont placés en seconde ligne comme réserve. Quant aux carabiniers et aux cuirassiers de Nansouty, ils avaient été envoyés pour prendre position et garder la trouée entre Heinrischsdorf et les bois de Friedland.

Grouchy commence l'attaque contre la cavalerie ennemie par la première ligne qui force après plusieurs charges vigoureuses, la cavalerie ennemie à se replier. Les Russes devenant menaçant vers Heinrischsdorf, Lannes prescrit à Grouchy de repousser l'ennemi. Le marquis qui avait envoyé chercher la division de cuirassiers, lance de front la brigade de dragon Milet qui charge, déployée en bataille, et enlève les pièces de canon pendant que la brigade Carrié tourne le village[cette action amènera la capture de 7 bouches à feu, de drapeaux et de 1500 prisonniers ]. L'ennemi sabré et dispersé s'enfuit, mais la cavalerie Russe vient au combat et tombe sur nos dragons qui plient devant le nombre et sont ramenés.

Alors le général Grouchy se met en tête des cuirassiers et, conduite par lui, la division se porte au secours des dragons, prend la charge et les escadrons ennemis sont repoussés.
Les Russes, ne pouvant se résoudre à perdre Heinrischsdorf amènent 66 escadrons, font tourner le village par les cosaques et marchent de nouveau sur la cavalerie française.

(2) Lachouque, p.651, Margerit, p.409
(3) Camon, p.228
(4) Picard, p.409

Par une manœuvre habile Grouchy trouve le moyen de ne pas refuser le combat malgré l'infériorité du nombre. Il commence par simuler une retraite pour attirer la cavalerie ennemie et fait rétrograder sa grosse cavalerie et la légère. Tout en se retirant, il établit son artillerie derrière les vergers en la faisant défendre par des pelotons de dragons à pieds, puis il embusque ses dragons sur le flanc.
Ordonnant alors un demi-tour au cuirassiers, ceux-ci se remettent en bataille face aux Russes et fondent sur les escadrons ennemis qui sont surpris en désordre et ramenés.
La cavalerie Russe se reforme et revient à l'attaque, Grouchy recommençant le même mouvement, attire les russes au delà de Heinrischsdorf, puis remet vivement les cuirassiers face en tête, les lance à la charge, et quand les russes passent devant le village, ils sont pris de flanc par les dragons embusqués, reçoivent la mitraille de l'artillerie, leurs pertes sont lourdes. La poursuite s'engage alors, elle se continuera jusque sur les bords de l'Alle»(5).

Dans cette journée le maréchal Grouchy a fait étalage de son sens tactique en utilisant au mieux ses hommes, la configuration du terrain, et même la ruse pour vaincre un ennemi très largement supérieur en nombre. Il a aussi démontré toute sa capacité à avoir des initiatives «à-propos», en prenant personnellement le commandement de charges ou de mouvements qui furent déterminants dans les moments les plus délicats de cette brillante action.



 



Compétence stratégique


Si l'habileté tactique permet d'aborder un ennemi avec succès, le sens stratégique est la qualité qui transforme un bon exécutant sur le terrain en chef d'orchestre capable d'opérer victorieusement sur une plus grande échelle en combinant l'action de forces nombreuses sur un vaste espace.

La retraite réalisée par le marquis avec ses forces, au lendemain de Waterloo, est un exploit malheureusement peu connu. En effet, si l'on analyse la situation de l'aile droite de l'armée (comptant un peut plus de 30000 hommes et 96 pièces d'artillerie), dont Grouchy assure le commandement, celle-ci est dramatique. Elle est seule au milieu de 200000 ennemis qui peuvent et doivent lui couper toute retraite et l'anéantir. Il s'agit là pour Blücher et Wellington d'une formalité.

L'exécution de cette formidable retraite est menée avec «une inlassable énergie par des troupes durement frappées au cours des combats des 16, 17, et 18 juin, fatiguées, mal nourries, moralement atteintes par la nouvelle du désastre, et ayant la certitude de leur isolement. Grouchy fera ici preuve de volonté, de ténacité, et de l'esprit de devoir. Il rassurera notamment ses blessés, très durement éprouvés par les marches, la chaleur et le manque de soins (6); il ne les abandonnera pas.

Durant cette retraite, l'aile droite est abandonnée par l'état major impérial. Aucun ordre, aucune information sur la situation des forces française n'est donné à Grouchy. Le 21 de Dinan, il écrit à Soult (major général de l'armée du Nord) :
«J'ai l'honneur de vous informer qu'étant sans nouvelles de SM et n'ayant reçu aucun ordre depuis l'annonce verbale de la perte de la bataille de Waterloo, qui me fut donnée par un officier de votre état major [Demonceau], pendant que j'étais au prise avec l'ennemi, que j'avais poussé et battu au delà de Rosieren,… J'ai effectué ma retraite sur la Sambre et de la sur Charlemont, où j'arriverai ce soir. Chaque jour de ma retraite a été marqué par des combats sanglants, mais glorieux pour les armées françaises. Je ramène les corps qui ont été mis sous mon commandement, affaiblis, ne formant plus qu'un total de vingt et quelque mille hommes, mais sans avoir perdu un trophée militaire, une pièce de canon, en ayant même enlevé à l'ennemi et lui ayant tué plus de monde et fait essuyer des pertes triples à celles que j'ai éprouvées moi même»(7).

Grouchy a donc sans la moindre instruction réussi à se forcer un passage avec un peu plus de 30000 hommes épuisés, affamés, démoralisés. Il les a ramenés en France au contact des restes de l'armée afin de pouvoir, si l'empereur l'avait souhaité, poursuivre le combat. Cet exploit a été commenté chez les auteurs allemands : Damitz «On doit regarder comme un fait peu flatteur pour l'armée prussienne que Grouchy ait pu opérer sa retraite sans perdre une partie de ses troupes»(8) , ou Clausewitz participant lui même à la campagne comme chef d'état-major au 3e corps de l'armée du Rhin «Il est rare qu'on fasse à la guerre tout ce qu'il faudrait faire»(9). Bel aveu de l'impuissance d'un grand théoricien de stratégie militaire sur le terrain !

(5) Bonie, «Cavalerie au combat», p.91-93
(6) Lachouque p.389
(7) Lachouque p.394
(8) Lachouque p.389
(9) Idem

Malgré la défaite de Waterloo, la fidélité de Grouchy envers l'Empereur en ces heures sombres ne fait aucun doute, comme en témoigne la proclamation faite à ses troupes le 22 juin, «Réunis à des forces nouvelles et au chef de l'empire, vous allez bientôt prendre l'attitude offensive qui vous convient. Défenseurs de notre chère patrie, vous préserverez son sol sacré… Je répond en votre nom à la patrie, que fidèle à vos serments, vous périrez plutôt que de la voir humiliée et asservie»(10).

(10) Lachouque p.395

Il recevra le même jour du ministre de la guerre la nouvelle de l'abdication. Davout lui écrira «la certitude que votre corps est conservé est d'un avantage incalculable dans les circonstances actuelles… L'arrivée de votre corps a fait la plus grande impression à Paris…Vous avez rendu à la France un service qui sera apprécié de tout le monde».
Ainsi, le prince d'Eckmûhl affirmant que Grouchy en sauvant son armée avait joué un rôle clé dans ce moment tragique de notre histoire se serait complètement trompé sur la valeur militaire de cette action ? Lui, le vainqueur d'Auerstaedt ?



L'expérience du commandement


Pour prétendre à un commandement important il faut justifier d'états de service exemplaires. Comment contester que ceux du général Grouchy étaient excellents puisque depuis le début des campagnes de la révolution et de l'empire il n'a cessé d'occuper des postes clés.

Celui-ci, entre à l'école d'artillerie de Strasbourg à l'age de 13 ans en mars 1780. Il en sort avec le grade de lieutenant en octobre. Servant d'abord comme sous-lieutenant au régiment d'artillerie de Besançon (août 1781), il est ensuite capitaine au régiment royal étranger de cavalerie (octobre 1784). En décembre 1786, le futur maréchal accède au grade de sous-lieutenant avec rang de lieutenant-colonel dans la compagnie écossaise des gardes du corps du roi avant d'être réformé en janvier 1787.

Bien que de noble lignage (son père a été page de Louis XV), il épouse les idées révolutionnaires et, reprenant du service durant les campagnes révolutionnaires, on le retrouve comme lieutenant-colonel au 12e chasseur à cheval en décembre 1791.
Sa progression est alors rapide, l'époque s'y prête merveilleusement. Promu colonel du 2e dragon en février 1792 puis du 6e hussard en juillet il est nommé général de brigade en septembre 1792.
En mai 1793, il est exclu de l'armée à cause de ses origines nobles avant d'être finalement réintégré au mois de novembre 1794. Nommé général de division en avril 1795, il sert comme chef d'état major de Hoche à l'armée de l'Ouest (1795-96). Il occupe la même fonction successivement aux armées du Nord et de Mayence (mars et juillet 1798), puis sous Moreau en Italie en mai 1799.

Sous l'empire, Grouchy assure avec brio des commandements majeurs durant chacune des campagnes :
«Campagne de 1806 : dans la réserve de cavalerie (commandée par Murat) il dirige une division de dragons (3e,6e,10e,11e,13e, et 22e régiments),
«Campagne de 1807 : dans la réserve de cavalerie (commandée par Bessières) il dirige une division de dragons (3e, 6e, 10e et 11e régiments),
«Campagne de 1809 : rattaché à l'armée d'Italie, il participe à la bataille de Raab (14 juin) où il commande la 1ere division de dragons (7e, 30e, régiments et dragons de la reine),
«Campagne de 1812 : dans la réserve de cavalerie dirigée par Murat, il commande le 3e corps de cavalerie. Soit la division de cavalerie légère Chastel (6e, 8e, 25e chasseurs, 6e hussards), la division de cuirassiers Doumerc (4e, 7e, 14e cuirassiers, 3e chevau légers), la division de dragons La Houssaye (7e, 13e, 18e et 35e régiments). En outre, durant la retraite il obtient le commandement honorifique de «l'Escadron Sacré», preuve de la confiance de l'armée en l'un de ses tout meilleurs officier de cavalerie alors en activité.
«Campagne de 1814 : Il commande en chef la cavalerie de la grande armée. Il se distinguera en plusieurs occasions au cours de cette brillante campagne (notamment à Vauchamps et Craonne).
«Campagne de 1815 : l'empereur ayant refusé les services de Murat, il confie tout naturellement à Grouchy le commandement de la réserve de cavalerie. Il a comme chef de corps les généraux Pajol (hussards, chasseurs et lanciers), Exelmans (dragons), Kellerman (dragons, cuirassier et carabiniers), et Milhaud (cuirassiers). Il dirige alors environs 13000 cavaliers.
Les événements de la campagne de 1815 conduiront Napoléon à le détacher comme commandant de l'aile droite de l'armée du nord.

Décoré de la grand croix de la légion d'honneur en 1807, Emmanuel de Grouchy est fait Comte d'empire le 28 janvier 1809, et obtient la distinction de maréchal d'Empire le 15 avril 1815.

Le maréchal a payé de son sang, versé aux quatre coins de l'Europe, tous les honneurs qui lui ont été rendus par la nation. Il a reçu 14 blessures en défendant Pasturana où il est fait prisonnier le 15 août 1799. Il est ensuite blessé à Eylau (8 février 1807), avant de recevoir un biscaïen à la Moscowa (7 septembre 1812). Il sera encore touché à la prise de Troyes (23 février 1814), puis atteint d'un coup de feu à la cuisse à Craonne (7mars 1814).



Le maréchal Grouchy


On peut maintenant s'intéresser à la situation des maréchaux d'empire en 1815. Ceux qui avaient été «choisis parmi les généraux les plus distingués»(11) furent durant l'empire les piliers du régime. Pourtant, au retour de l'île d'Elbe, force est de constater que cette élite s'est pour le moins réduite.

Certains furent logiquement écartés pour leur rôle en 1814 et durant la première restauration (Berthier, Murat Marmont, Augereau).
D'autres semblaient usés par les années (Lefebvre, Pérignon, Serrurier, Kellermann, Masséna, Jourdan, Moncey).
D'autres enfin refusèrent, plus ou moins ouvertement, de se rallier (Victor, Oudinot, Macdonald, Gouvion-Saint-Cyr).
L'empereur demanda d'ailleurs le 10 avril 1815 à Davout, ministre de la guerre, «d'effacer de la liste des maréchaux le prince de Neuchâtel [Berthier], le duc de Raguse [Marmont], le duc de Bellune [Victor], le maréchal Pérignon, le duc de Castiglione [Augereau], le duc de Valmy [Kellermann]».

Si on ajoute à cette liste les disparus (Lannes, Bessières, Poniatowski), il ne reste, pour servir la France durant les cent jours, que les maréchaux Ney, Soult, Mortier, Davout, Suchet et Brune. En outre, il est un doux euphémisme de dire que ceux-ci ne seront pas employés de façon optimale par leur maître.

Brune sera relégué au poste secondaire de commandant de l'armée d'observation du Var.
Suchet sera nommé commandant l'armée des Alpes, conformément aux plans de Napoléon il attaquera la Savoie et s'y maintiendra jusqu'au 30 juin.
Mortier sera nommé le 8 juin commandant de la cavalerie de la garde impériale, mais victime d'une sciatique, il n'a pas rejoint son poste.
Davout, était ministre de la guerre durant les cent jours. Napoléon avait dû le convaincre qu'il avait l'étoffe pour occuper cette fonction. Au départ pour la Belgique, l'Empereur se montrera rassuré de la présence à Paris d'un homme de confiance. Mais le prince d'Eckmühl n'aurait-il pas été encore plus utile en campagne au commandement d'un corps ?

Au final, seuls Ney et Soult accompagnent l'empereur en Belgique.

Le prince de la Moskowa n'a aucun commandement à l'entrée en campagne. Il rejoint l'armée le 15 juin après-midi de façon indépendante, sans savoir dans quelle mesure il entre dans les plans de l'Empereur et avec un seul officier pour état-major (le colonel Heymès). En effet, Napoléon à simplement demandé à Davout le 11juin «Faites appeler le maréchal Ney, dites-lui que s'il veut se trouver aux premières batailles, il soit rendu le 14 à Avesnes, où sera mon quartier général»(12) . Une façon bien particulière de réclamer les services du héros de la retraite de Russie. Celui-ci ne viendra que s'il en manifeste la volonté. En d'autres termes, l'Empereur peut se passer de lui. Fort heureusement pour la France, comment douter de la présence du brave des braves au moment où l'ennemi menace sa patrie.

(11) Article 48 de la loi du 18 mai 1804, établissant l'Empire, cet article rétablissait le maréchalat (sources Tradition Magazine hors série numéro 12 p. 5)
(12) Lachouque p.162

Le duc de Dalmatie remplace Berthier comme major général de l'armée du Nord. Il se montrera tout au long la campagne bien incapable d'assurer cette lourde fonction où le prince de Neufchatel excellait. Napoléon prendra d'ailleurs rapidement conscience des limites de l'état major impérial, pour preuve les ordres écrit le 16 juin à Ney et Grouchy «Le major général a dû vous faire connaître mes intentions ; mais comme il, a des officiers mal montés, mon aide de camp arrivera peut-être avant»(13). En outre, son comportement durant la première restauration lui a attiré la méfiance voire la haine de certains cadres de l'armée. Notamment Vandamme et D'Erlon. Il est vrai que ce dernier a été condamné à mort par Soult, alors ministre de la guerre de Louis XVIII, pour avoir cherché à «embaucher les soldats du roi au nom de l'infâme usurpateur Bonaparte»(14).

L'envie chez l'empereur de distinguer de nouveaux mérites, de renouveler une classe décimée par les années et les épreuves paraît donc légitime. Il doit reformer une phalange prête à le soutenir dans les épreuves qui l'attendent.

Dans cette perspective, il apparaît, à la vue de ses états de service et de sa constante fidélité, qu'Emmanuel de Grouchy était un candidat sérieux pour l'obtention du bâton de Maréchal d'Empire.
Certes, il n'était pas le seul. Gérard notamment qui, ironie du sort, souffrira d'être placé sous son commandement, ou bien Mouton, auraient pu justement prétendre à cette distinction.
En outre, le marquis a assuré en 1814, et assurera dans la campagne qui va s'ouvrir, le commandement de la réserve de cavalerie qui a toujours été confié à un maréchal.
A l'évidence, en 1815 Grouchy représente un des meilleurs espoirs pour l'empereur d'assurer le renouvellement de ses maréchaux.

Il est nommé maréchal d'Empire le 15 avril 1815.



La campagne de Belgique


Dans le dispositif impérial pour la campagne de Belgique, le maréchal Grouchy devait initialement commander la réserve de cavalerie(15) . Mais au matin du 16 juin, l'empereur décide de modifier son organisation initiale, il décompose alors ses forces en trois entités :

«Une aile gauche, composée du 1e corps d'armée commandé par le comte D'Erlon (divisions Quiot, Donzelot, Marcognet et Durutte plus la division de cavalerie légère du baron Jacquinot), du 2e corps sous le comte Reille (divisions Bachelu, Jérome Bonaparte, Girard et Foy et la division de cavalerie légère du général Piré), ainsi que du 3e corps de cavalerie mené par le général Kellermann (divisions de cavalerie Lhéritier et d'Hurbal comprenant 2 régiments de dragons, 2 de carabiniers, et 4 de cuirassiers).
Au total l'aile droite compte 39500 fantassins, 7000 cavaliers, 2400 artilleurs pour 104 bouches à feu, celle-ci est placé sous le commandement du maréchal Ney.

«Une aile droite, composée du 3e corps d'armée commandé par le comte Vandamme (divisions Lefol, Habert, et Bertzène, plus la division de cavalerie légère du général Domon), du 4e corps dirigé par le général Gérard (divisions Pécheux, Vichery, et Hulot, plus la cavalerie légère du général Maurin), ainsi que du 1e corps de cavalerie commandé par le général Pajol (divisions de cavalerie légère Soult et Subervie soit 3 régiments de hussards, 2 de lanciers et 1 de chasseurs), du 2e de cavalerie sous Exelmans (divisions de cavalerie Strolz et Chastel soit 8 régiments de dragons), et du 4e dirigé par le général Milhaud (divisions de cavalerie Saint-Alphonse et Delort soit 8 régiments de cuirassiers).
Au total l'aile droite compte 27900 fantassins, 11100 cavaliers, et 2890 artilleurs pour 112 pièces, celle-ci est placé sous la direction du maréchal de Grouchy.

«Une réserve, composée du 6e corps d'armée commandé par le comte de Lobau (divisions Simmer, Jeanin, et Teste) et de la garde impériale placée sous le commandement du général Drouot. L'empereur dirige en personne cette réserve, elle compte 22000 fantassins, 4000 cavaliers, et 3700 artilleurs pour 150 bouches à feu.

A noter qu'à son entrée en campagne, l'armée française rassemble sous ses aigles 112468 hommes (90000 fantassins, 22000 cavaliers, et 366 pièces d'artillerie). A opposer aux armées alliées alors en Belgique. Soit les troupes du perfide albion, dénommée armée des Pays-Bas et comptant beaucoup de non britanniques dans ses rangs (Hollandais, Belges, et Allemands) sous le commandement du duc de Wellington (au total 70000 fantassins, 15000 cavaliers et 219 pièces) ; et l'armée prussienne dénommée armée du Bas-Rhin commandée par le Feld Marshall prince Von Blücher (comptant 105000 fantassins, 12000 cavaliers, et 219 bouches à feu).


 
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Re : Marechal Grouchy
« Réponse #1 le: 05 octobre 2009, 16:40:16 pm »
Coignet, je ne suis pas sûr que tu ais bien compris les remarques de JMM et de DominiqueT concernant la propriété intellectuelle. Le texte cité, ci-dessus, appartient au site du 10ème régiment de Chasseurs à Cheval de la Garde Impériale, http://10escadron.free.fr/pages/articles/grouchy1.html. Donc, la marche à suivre est la suivante : demander l'autorisation de reproduction aux administrateurs du site ou à l'auteur de l'article (Patrice Barrau) puis après accord poster l'intégralité du texte sur notre forum avec à la fin la mention : article de Patrice Barrau, tiré du site 10escadron.free.fr OU ne pas demander d'autorisation et dans ce cas ne pas posté le texte intégralement (ou posté un court extrait avec les mêmes mentions que ci-dessus) mais simplement le lien sur lequel on peut le trouver (même procédure pour les images) ;).
« Modifié: 05 octobre 2009, 16:43:59 pm par lodi57 »
“Jamais d’aultres armes nous prendront, que celles que nous élisons ; et nous disons pour réconfort, nous voulons la liberté ou la mort !”

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Re : Marechal Grouchy
« Réponse #2 le: 06 octobre 2009, 11:17:00 am »
je pensais qu en laissant le texte,avec les references d ecrivains ,cela serait sufisant milles excuses, :oops:
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Re : Marechal Grouchy
« Réponse #3 le: 06 octobre 2009, 19:41:56 pm »
OYE OYE !
Même si ça part d'un bon sentiment, recopier un texte sans l'accord de son auteur est légalement un délit  :?
Dominique T et Lodi vous ont tour à tour rappelé les lois concernant la propriété intellectuelle. Je vous rappelle la procédure à suivre détaillée par Lodi lorsque vous souhaitez reprendre le texte d'un autre:
 
la marche à suivre est la suivante : demander l'autorisation de reproduction aux administrateurs du site ou à l'auteur de l'article puis après accord poster l'intégralité du texte sur notre forum avec à la fin la mention ( ex: article de Patrice Barrau, tiré du site 10escadron.free.fr) OU ne pas demander d'autorisation et dans ce cas ne pas posté le texte intégralement (ou posté un court extrait avec les mêmes mentions que ci-dessus) mais simplement le lien sur lequel on peut le trouver (même procédure pour les images) ;).

Afin d'éviter tout litige éventuel, les textes reconnus comme étant des copies seront dorénavant directement supprimés du forum si vous ne suivez pas la procédure expliquée  ;)

En guerre comme en amour, pour en finir il faut se voir de près
Napoléon 1er