bonjour Messieurs.
alors oui ou non ont-ils brulés ?
à la lecture de ce texte je dirais non !
mais auriez-vous d'autres sources !!¨
Tableau de Wojciech Kossak montrant les aigles impériales en train de brûler sous les yeux de Napoléon
Dans beaucoup de livres concernant la campagne de Russie de 1812, on lit ceci: « Le 23 novembre 1812 à Bobr, Napoléon 1er brûle les aigles de tous les corps ». Il existe même un tableau de cette scène du polonais Wojcieh Kossak. Pourtant, le général Soltyk ne mentionne pas un tel évènement dans ses mémoires. Dans les mémoires du général Lejeune, rien. Dans « l’histoire de consulat et de l’Empire » d’Adolphe Thiers, rien non plus. Dans le livre de Curtis Cate: « on enterra beaucoup d’aigles de régiment. On décrocha des drapeaux de leurs hampes et on les enroula autour de la poitrine des portes drapeau, sous leur uniforme, pour les mettre à l’abri de l’ennemi. » Quelle est sa source? Dans un livre d’André Castelot, on lit: « le 23 novembre à 16h, l’Empereur arrive à Bobr et ordonne la formation de quatre compagnies de gardes d’honneur, composées de tous les officiers de la cavalerie montée… Les aigles de tous les corps sont jetées dans les flammes, ces emblèmes que l’Empereur avait remis à ses soldats au camp de Boulogne. Quel tableau que l’incendie des Aigles! s’exclame Constant en racontant la scène ». André Castelot cite les mémoires de Constant. C’est bizarre, c’est connu qu’il n’a pas écrit « ses mémoires » tout seul. A l’époque, c’était courant que des écrivains contactent des personnalités du 1er Empire pour écrire leurs mémoires. Avec quelques anecdotes et des livres précédemment publiés sur cette période, ils « aident » ces personnalités. Dans les mémoires de Constant, effectivement, à la page 255 du deuxième tome, on lit: « Quel tableau que celui de l’incendie des Aigles, surtout pour ceux qui, comme moi, avaient assisté à la magnifique cérémonie de leur distribution à l’armée du camp de Boulogne, avant la campagne d’Austerlitz! ». Ensuite, on lit les notes à la fin du livre (note 257 page 600 du deuxième tome) et là, il est précisé que tout le passage, concernant la destruction des Aigles et la formation de l’escadron sacré, vient des mémoires de Ségur. Les mémoires du général Philippe-Paul de Ségur? Ah! Cela tombe bien, car sur internet, on peut trouver, sur googlebook, le livre du général Gourgaud intitulé « Napoléon et la Grande Armée en Russie ou l’examen critique de l’ouvrage de monsieur le comte Ph. de Ségur ». Et là, tout devient plus clair dans le chapitre III, page 249… Gourgaud explique que cet épisode n’a jamais eu lieu et que c’est une pure invention!
Tout d’abord, les aigles étaient en cuivre. Ça brûle mal le cuivre, et c’est pour cette raison qu’on faisait des casseroles en cuivre.
Ensuite, pourquoi faire brûler les aigles au moment où Napoléon fait rallier les isolés et fait distribuer des fusils? (Voir l’ordre du major général de l’armée du 20 novembre à Orcha, page 605)
Comment penser que l’armée de Napoléon est perdue le 23 novembre 1812, au moment où les corps d’Oudinot et de Victor et la division Dombrowski se réunissent? Quelques jours avant, la situation à Krasnoë était beaucoup plus dangereuse et on n’y a pas brulé les aigles.
Si on avait brûlé les aigles, cela aurait été le signal du « sauve qui peut » de la désorganisation.
Ségur se contredit à la page 397: « La plupart des colonels marchaient encore avec quelques officiers autour de leur aigle »
Le Maréchal Ney, dans une lettre à Berthier datée du 2 décembre, annonce qu’il a envoyé les aigles à la suite de la Garde.
On peut ajouter à cela:
Pourquoi garder des canons de plusieurs tonnes et se débarrasser des étendards de quelques kilos?
Pourquoi ne brûler que les aigles? Beaucoup des soldats étaient alliés et ils avaient leurs propres drapeaux; eux, ne les ont pas brûlés.
Comment penser que Napoléon ait pu donner un tel ordre? Il faut ne jamais avoir lu ses lettres ou ses ordres pour penser cela! Comment l’homme, qui avait l’habitude de dire « impossible n’est pas français » ou »le, on ne peut pas, me talonne… j’avance toujours », aurait pu donner un tel ordre? De plus, le 22 novembre, Napoléon est à Toloczin, et il y a 80 kilomètres jusqu’à Borisow où il arrive le 24. Le 23 novembre, il s’arrête à Bobr où il apprend par le Général Corbineau qu’il y a un gué à Studianka. L’état-major rédige des ordres pour les manœuvres à venir. Mais à 16 h, après une marche épuisante et alors qu’il fait presque nuit, ils auraient eu le loisir de rassembler les aigles et d’en faire un bûcher…???
Dans le livre »A propos des aigles impériales » de Pierre Charrié, on y apprend l’attachement des soldats pour leur aigle. Il ne faut pas connaître la force de ce symbole pour penser que des soldats puissent donner volontairement leur aigle pour le brûler.
Voilà, une fois de plus, c’est l’histoire de l’homme qui a vu l’homme qui a vu l’ours. Et l’homme qui a vu l’ours, c’est le comte de Ségur! C’est triste que des historiens reprennent les mémoires de Ségur sans se poser la question de savoir si brûler du cuivre dans ces conditions était possible…
François Lelouard, Carré Impérial France
salutations Grognards.